Le paradoxe du développement d’une brasserie et de son financement
Après vous avoir parlé des brasseurs amateurs dans notre article précédent, abordons un sujet qui y est de plus en plus lié : le crowdfunding brassicole...
Faire de la bière dans sa cave, c'est bien. Se mettre en règle pour pouvoir la vendre légalement, c'est très bien. Pouvoir financer cette entreprise en devenir, c'est encore mieux ! Et comme dans beaucoup de domaines, l'argent reste le nerf de la guerre. Plutôt que de compter sur les banques (souvent frileuses pour financer une énième brasserie belge), certains se tournent vers le grand public et, espérons-le, leurs futurs clients pour financer leur rêve brassicole.
Les premiers à avoir initié ce « financement par la foule » sont les créateurs déjantés de la brasserie BrewDog à Aberdeen en Ecosse. Et le succès fut retentissant. D'abord pour développer leurs installations écossaises puis pour ouvrir des BrewDogBar à travers le monde, ensuite pour s'implanter sur le marché américain et dernièrement pour réaliser un hôtel comprenant une brasserie et un jacuzzi à la bière... Levée de fonds après levée de fonds, ils comptent aujourd'hui plus de 46.000 « investisseurs » dans la famille !
En Belgique, la dynamique a été lancée par le Brussels Beer Project. En échange de 180€, vous contribuez au développement d'un projet innovant mais surtout vous vous assurez une rente « viabière » de 12 bouteilles par an ! Et en tant que (jeunes) amateurs de bières, notre calcul a été vite fait. Depuis 2013, Namur Capitale de la bière se retrouve donc « crowdfunder » (comme près de 2500 autres) d'un projet emblématique de la capitale belge. Outre l'apport financier, les contributeurs sont consultés régulièrement pour donner leur avis sur le prochain produit de la gamme ou pour participer à des événements spécifiques.
Une déclinaison namuroise a évidemment suivi. Début 2016, apparaissait sur un site dédié au crowdfunding le projet de la brasserie du Clocher à Malonne. Le rêve un peu fou de 2 passionnés de transformer une église désacralisée en temple de la bière. Des travaux qui nécessitent évidemment un petit paquet d'euros auxquels le crowdfunding va contribuer.
Mais pas que... mettre son projet en avant sur ce genre de site internet est surtout une formidable opération marketing. Facile à partager sur les réseaux sociaux, un simple site web va pouvoir toucher la presse, les amateurs de bières, les habitants du quartier et faire parler d'un produit qui souvent n'existe pas encore. Un moyen puissant de susciter l'enthousiasme et l'impatience avant même la mise sur le marché.
D'autres exemples récents illustrent cette tendance (Dikkenek, Nanobrasserie de l'Ermitage, Hepta...). Le risque étant d'arriver à une sorte de saturation due au trop grand nombre de sollicitations de ce genre. Et malheureusement, un crowdfunding raté peut donner une image négative au projet.
Même si l'initiative a à chaque fois un objectif similaire (financer la création d'une brasserie), les contreparties varient d'un projet à l'autre. Là où le Brussels Beer Project propose des bières à vie, la nanobrasserie de l'Ermitage « offre » (contre 200€) un tshirt, 24 bières et la participation à une journée de brassage (expérience à tester une fois dans votre vie). Le dernier cas en date, la brasserie namuroise Hepta, vous garanti contre 150€ 7 bières par an pendant 7 ans...et un décapsuleur aimanté !
Rassurez-vous, vous pouvez déjà soutenir ces projets à partir de 5€. La contrepartie ? Un « merci » et la fierté de contribuer à la création d'un nouveau projet brassicole local basé sur le savoir-faire d'un artisan. Et ce sentiment, on peut vous assurer qu'il donne un goût encore meilleur aux bières que nous dégustons...
Emilien & Sébastien, crowdfunders passionnés